18.2.05

Devant lui, je suis comme un enfant nu.

Il y a eu un premier rendez-vous manqué. Il était malade. Je n'ai pas douté de sa sincérité et je n'ai pas envisagé une excuse sans fondement pour fuir. Depuis le départ il me parait franc, simple, direct. Quel intérêt de donner un rendez-vous puis de l'annuler, autant ne pas le fixer. Nous nous étions promis de le reporter.
Du coup j'ai eu plus de temps pour m'y préparer. Depuis des jours j'y pense, j'appréhende, je me dis que vais je lui dire ? je voudrai lui parler de moi et l'écouter parler de lui, lui qui semble si handicapé pour parler de lui. Il parle de lui différement, autrement. Son langage n'est pas le notre. Il faut simplement s'adapter je pense. Bref, je n'ai pas peur de lui, juste peur de le déranger, de l'embetter, de venir troubler sa vie, de remuer des choses enfouies.
J'ai vu une ou deux photos, pas très bonnes, pas à son avantage. Je lui ai déjà dit. Je pense qu'il mérite mieux que ça. Je rale.
Il répond à mon mail et me dit de l'appeler pour que l'on fixe rendez-vous. Je m'exécute quelques jours plus tard. Il semble si doux, si calme, si posé. Ce garçon m'intrigue. Je suis curieux. Il me donne rendez-vous, heure, lieu. Je ferai d'une pierre deux coups en repérant un lieu qui pourrait m'être utile à l'avenir.
Jour J. Je m'efforce de préparer cette rencontre, de préparer une sorte de trame afin d'equilibrer cette rencontre entre l'écoute et le discours, pour que le monologue soit un dialogue. Mon esprit est embrouillé et je ne parviens pas à me concentrer. J'ère dans cette ville et je cours pour réaliser le programme que je m'étais fixé. Trois rencontres. La première est manquée : quand je suis chez lui, il est chez moi et inversement, amusant. L'heure tourne. La deuxième est un rapide passage pour revoir un ami, je me gare en double file, il est ennervé, malade, il ne m'écoute pas. Je repars en pensant à cette dernière rencontre qui arrive. Je traverse toute la ville. Il faut absolument que je m'y prépare.
Je me demande ce que j'attends de cette rencontre, si je ne vais pas être déçu, s'il y aura une suite. Et de son côté qu'en attend il ? il n'a pas besoin de moi, il a tout ce qu'il faut pour vivre heureux je pense.
Je tourne un peu, je me perds, je reviens sur mes pas pour enfin arriver au lieu de rendez-vous. C'est étonnant la différence entre un plan et la réalité. Les distances sont bien plus courtes que sur la carte, tout semble si proche et si petit, tant mieux ça me rassure.
Je me gare, je l'appelle, il me dit "j'arrive". Je marche un peu dans le froid et dans le vent. Je me poste à un carrefour ne sachant d'où il va venir. En fait je ne sais même pas trop à quoi il ressemble mais bon on se reconnaîtra tout de même. J'ai un peu peur. J'ai l'impression de me présenter à un entretien d'embauche, de devoir faire bonne impression, d'être contraint de montrer le meilleur de moi-même, de devoir faire bonne impression. Mais je veux être simple, moi-même, me mettre à nu.
Le temps me semble une eternité. Une silhouette arrive au loin. Ca n'est pas la bête bodybuildé que j'imaginais, tant mieux, ça me rassure aussi. Il m'embrasse sans hésitation. Sa voix est douce, un souffle. Il prend l'initiative "on va boire un café", j'acquiesse, je me laisse porter. Il a une angine, décidement.
Les heures qui ont suivies ont été courtes. Il faudra peut être oser une nouvelle rencontre, s'il le désire, je ne peux l'y forcer. Il m'a montré son appartement, magnifique. Je n'ai pas tout découvert dans son entourage. Il fallait certainement cette première rencontre avant de passer à l'étape suivante. Il n'imagine pas le plaisir qu'il m'a fait. Enfin j'ai pris plaisir, un plaisir simple, un plaisir naturel et profond. Dix mille choses me trottent en tête. Il rencontrera bientôt un écrivain, passion commune. Je l'envie. Il est simple, sensible et fragile comme un enfant, mais tellement fort intérieurement, je l'envie.

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